L’évacuation des réfugiés depuis la Libye, conditionnée par le développement de voies légales d’accès depuis le Niger
La récente médiatisation de la situation des migrants en Libye, enfermés dans des centres de détention officiels ou officieux, a révélé une situation chaotique et désastreuse, pourtant connue depuis longtemps par les autorités politiques et dénoncée par les défenseurs des droits humains.
A l’occasion du Sommet Union africaine-Union européenne (UA-UE) de novembre 2017, une force conjointe s’est organisée, avec l’appui des de l’Organisation des Nations unies (ONU), pour mettre en oeuvre des missions d’évacuations. Aujourd’hui, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) a annoncé avoir atteint son objectif de 15 000 retours volontaires assistés depuis la Libye et 1 300 réfugiés ont également été évacués par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) en grande partie vers le Niger.
L’UE souhaite poursuivre ces missions et a adopté le 26 février 2018 un nouveau programme de 115 millions d’euros pour soutenir la force conjointe UE-UA-ONU. L’objectif est de fournir une protection aux migrants et aux réfugiés en Libye et d’assister l’évacuation de 3 800 personnes supplémentaires en besoin de protection internationale. D’autres mesures sont également prévues pour soutenir la réintégration des migrants dans leurs pays d’origine et pour améliorer l’assistance auprès des migrants dans la région du Sahel et du Lac Tchad.
Cependant, la réinstallation des évacués de Libye depuis le Niger est très lente. Lors d’une intervention auprès du Parlement européen le 5 mars 2018, le HCR indiquait que seules 25 personnes auraient été réinstallées depuis le centre de transit basé à Agadez (au nord du Niger) après leur évacuation. Les vols d’évacuation vers le Niger sont actuellement interrompus suite à une demande officielle du gouvernement nigérien qui s’inquiète du processus extrêmement lent dans la réinstallation des évacués. Non seulement les engagements des Etats européens restent modestes, mais les processus d’entretiens et de vérification de sécurité sont extrêmement longs et ne permettent pas de répondre aux besoins croissants sur le terrain. On évalue encore à près de 5 000 le nombre de personnes détenues dans les centres de détention officiels, et un nombre inconnu dans les centres officieux gérés par des milices privées dans des conditions de vie désastreuses.
Dans son rapport annuel d’évaluation des besoins en matière de réinstallation de 2018, le HCR fait état d’un niveau sans précédent de déplacements forcés, et évalue à 1,2 million de réfugiés en besoin de solutions durables dans le monde pour l’année 2018. La situation en Méditerranée centrale, regroupant 15 pays d’asile et de transit le long de l’itinéraire migratoire, est particulièrement inquiétante. Le HCR évalue à près de 277 000 réfugiés en besoin de réinstallation depuis ces pays. En septembre 2017, le HCR a lancé un appel urgent de 40 000 places de réinstallation. Dans ce contexte, les Etats doivent proposer de nouveaux engagements pour développer et renforcer les programmes de réinstallation.
Si la réinstallation est une solution durable et protectrice pour les réfugiés vulnérables sans perspective d’intégration dans le premier pays d’accueil, elle ne doit pas être la seule voie envisagée. Plus généralement, l’ouverture de voies légales et sûres d’accès, additionnelles à la réinstallation (voir notre article de newsletter de janvier 2018), permettrait de répondre à ces besoins depuis le Niger, à travers :
- la pleine mise en œuvre et l’élargissement du droit à la réunification familiale, qui garantit le droit à l’unité familiale du réfugié
- la délivrance de visas étudiants et de bourses scolaires
- la délivrance de visas humanitaires
- le développement et l’encadrement de programmes de parrainage privé