Forum réfugiés-Cosi salue cette décision historique, la « protection temporaire » n’ayant jamais été appliquée jusqu’à présent. Elle permet une protection rapide et harmonisée dans une situation d’« afflux massif de personnes déplacées », sans impacter les systèmes d’asile des États membres. Alors que le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a recensé plus d’un million de personnes ayant dû fuir le pays en une semaine, l’Union européenne apporte ainsi une réponse forte en matière d’accueil, de solidarité et de protection.  

La directive 2001/55/CE du Conseil du 20 juillet 2001, dite « directive protection temporaire », permet aux personnes concernées, à savoir les Ukrainiens et les réfugiés ou apatrides résidant dans le pays et ayant fui après le 24 février 2022, de solliciter auprès des États membres de l’UE une autorisation de séjour pouvant s’étendre jusqu’à 3 ans et assortie d’un droit au travail ainsi que de nombreux droits sociaux.

La déclinaison à l’échelle française, qui devrait être formalisée prochainement, sera fondée sur les dispositions pertinentes du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA, art. L. 581-1 et suivants et R.581-1 et suivants). Les bénéficiaires pourront solliciter en préfecture une autorisation provisoire de séjour incluant un droit au travail. Si cette démarche ne s’inscrit pas dans le système d’asile, les bénéficiaires seront éligibles, sous condition de ressources, à l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA). La possibilité de demander l’asile demeure cependant ouverte pour les Ukrainiens, notamment pour ceux ayant fui le pays avant le 24 février et qui peuvent prétendre à une protection dans le cadre d’une première demande ou d’un réexamen fondé sur l’évolution de la situation dans leur pays d’origine.

Au-delà de ces enjeux administratifs, l’accueil des Ukrainiens demeure soumis à de nombreuses interrogations. Le nombre de personnes concernées dépendra des mesures de solidarité qui pourraient être décidées entre États et aboutir à des relocalisations vers la France depuis les pays voisins de l’Ukraine (Pologne, Roumanie, Moldavie, Hongrie, Slovaquie). À défaut, la France n’accueillera que les Ukrainiens ayant décidé de rejoindre notre pays, et ce librement puisqu’ils disposent d’une dispense de visa au sein de l’UE et que des décisions ont été prises par ailleurs par l’UE pour faciliter leur circulation. Dans ce dernier cas, leur nombre pourrait rester limité dès lors que cette communauté est peu représentée dans notre pays (Eurostat recensait moins de 15 000 Ukrainiens présents en France en 2020 contre près de 500 000 en Pologne, 224 000 en Italie, 165 000 en République tchèque et 95 000 en Espagne).

Les dispositifs d’accueil à mettre en place pour les Ukrainiens qui solliciteront la protection temporaire ne pourront s’appuyer sur les lieux d’hébergement pour demandeur d’asile au sein du dispositif national d’accueil (DNA), le cadre juridique n’ayant pas de lien avec la procédure d’asile. Il sera avant tout nécessaire de proposer un hébergement temporaire à ceux qui ne peuvent en disposer, puis de les accompagner dans l’accès à l’emploi et au logement, comme cela peut se faire dans le cadre des programmes d’intégration des réfugiés de type Accelair.

Les Ukrainiens non éligibles au statut de protection temporaire, ou qui feront le choix de demander l’asile, pourront bénéficier des conditions matérielles d’accueil (ADA et orientation dans le DNA). Il  conviendra d’accorder celles-ci aux personnes ayant sollicité le réexamen de leur demande d’asile, bien que leur attribution soit ordinairement facultative.

 

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