Pacte mondial sur les réfugiés : quel bilan des engagements pris en 2019 ?
Le premier Forum mondial sur les réfugiés qui s’est tenu en décembre 2019 fut l’occasion pour la communauté internationale de prendre des engagements afin d’atteindre les objectifs du Pacte mondial sur les réfugiés, afin de mieux répartir la responsabilité de l’accueil, renforcer l’autonomie des réfugiés, et élargir l’accès aux solutions durables. Les 14 et 15 décembre 2021, les États, les acteurs la société civile, du secteur privé, des organisations internationales et des réfugiés se sont réunis pour échanger sur les progrès accomplis ces deux dernières années.
Approuvée 2018, le Pacte mondial sur les réfugiés vise à renforcer la coopération internationale en matière d’accueil des demandeurs d’asile et des réfugiés dans le monde. Il a permis d’engager la communauté internationale dans un cadre commun afin d’améliorer les conditions de vie des réfugiés, et de fixer des objectifs à atteindre. 3 000 participants se sont alors réunis en 2019 lors du premier Forum mondial afin d’échanger et de s’engager à atteindre les objectifs du Pacte. Plus de 1 500 engagements et contributions ont été soumis par toutes les parties prenantes et sont aujourd’hui suivis et évalués par la communauté internationale.
En premier lieu, le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a publié en novembre 2021 un rapport qui dresse le bilan des progrès réalisés. Un cadre d’évaluation a été établi dans le Pacte et se compose de quinze indicateurs qui mesurent les progrès réalisés depuis 2016, année de la Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants qui fait partie intégrante du Pacte. Les indicateurs incluent par exemple le volume d’aide publique au développement (APD) fournie aux réfugiés et aux communautés hôtes des réfugiés, le volume de donateurs de l’APD, la proportion dédiée aux acteurs nationaux, la proportion de réfugiés ayant accès à un emploi décent, capable de se déplacer librement dans le pays d’accueil, ayant accès à l’école, aux programmes de réinstallation ou encore le nombre de réfugiés avec des documents officiels d’identité.
En premier lieu, il doit être rappelé que le nombre de réfugiés n’a cessé d’augmenter depuis 2016 avec 26,4 millions de personne à la fin de l’année 2020, soit 3,5 millions de réfugiés de plus sous le mandat du HCR en 2020 par rapport à 2016. Si des avancées ont permis de renforcer le soutien aux pays aux plus faibles ressources avec un triplement du nombre de partenaires contribuant à l’accueil des réfugiés et une augmentation constante de l’APD bilatérale (+10% entre 2016 et 2019), ils restent les premiers à assurer la plus grande responsabilité de l’accueil des réfugiés et accueillent 86% des réfugiés dans le monde. Vingt pays accueillent plus des trois quart des réfugiés dans le monde, dont seize étaient déjà dans le top 20 en 2016. En matière d’autonomie des réfugiés, 75% ont le droit légal de travailler dans le pays d’accueil mais deux tiers continuent de vivre sous le seuil de pauvreté, et un tiers ne bénéficie pas de la liberté de mouvement.
Le rapport HCR de novembre 2021 souligne par ailleurs que la pandémie a augmenté de manière globale la pauvreté dans le monde, plongeant 100 millions de personnes dans l’extrême pauvreté, dont de nombreux réfugiés mais aussi des communautés d’accueil. Cependant, l’assistance fournie par les agences humanitaires, les partenaires de développement et les gouvernements a permis d’atténuer et de réduire l’exposition à la pauvreté. Par exemple, en 2020, le HCR a fourni 695 millions de dollars d’aide en espèce à environ 8,5 millions de personnes dans plus de 100 pays, dont 95% ont indiqué une amélioration des conditions de vie. L’accès à l’éducation est également un enjeu majeur pour faciliter l’accès à l’autonomisation. Pourtant près de la moitié des élèves réfugiés ne sont toujours pas scolarisés (1,8 million) et les filles réfugiées ont moins de chance d’avoir accès à l’éducation. Enfin, en matière de solutions durables, le rapport indique une augmentation du nombre de réfugiés ayant pu accéder à une solution entre 2016 et 2020. Dans le même temps, le nombre de réfugiés se trouvant dans des situations de crise prolongées a également augmenté, tendance exacerbée par la pandémie. Les besoins en matière de réinstallation ont augmenté de 25% alors que les places proposées par les États n’ont jamais étaient aussi peu nombreuses. Enfin, 2 millions de réfugiés sont retournés volontairement dans leur pays d’origine. Entre 2016 et 2020, les retours volontaires représentaient près des trois quarts de toutes les solutions durables.
Le HCR souligne que ce rapport met certes en exergue des lacunes importantes et parfois des reculs, mais il fournit également une base factuelle afin de déterminer les points d’amélioration et les priorités. La réunion de hauts responsables visait à compléter ce bilan afin d’évaluer les avancées sur les engagements pris en 2019 par chaque partie prenante. Chaque organisation et gouvernement était invité à indiquer l’état d’avancement de son engagement, ses difficultés et comment elles pourraient être surmontés. Cette réunion a été précédé de réunions préparatoires virtuelles organisées par le HCR permettant d’aborder plus en détails plusieurs sujets clés du Pacte et des engagements notamment le financement, les partenariats, l’autonomie, et les solutions en consultation et en collaboration avec les organisations de la société civile, du secteur privé, des réfugiés, les organisations internationales et les autorités nationales. En ouverture de cette réunion, le Haut-commissaire aux droits de l’homme Filippo Grandi a réitéré ses « graves préoccupations concernant certaines tendances dans certains des pays industrialisés du monde » tout en estimant au regard des engagements récents des États que « nous sommes peut-être à nouveau sur la bonne voie ».
Photo d'illustration : © UNHCR/Mark Henley