Que sait-on des « dispositifs de préparation au retour » ?
Les centres de préparation au retour, devenus dispositifs de préparation au retour (DPAR), accompagnent plusieurs milliers de personne chaque année depuis leur lancement à titre expérimental en 2015. Alors que la capacité de ces lieux va plus que doubler en 2021, leur fonctionnement n’est encore encadré par aucun texte.
Le projet de loi de finances pour 2021 prévoit la création de 4 500 places dédiées aux demandeurs d’asile (voir notre article de novembre 2020 à ce sujet), mais également 1 500 places au sein du dispositif de préparation au retour (DPAR).
Le budget prévu pour la création de ces places en 2021 est de 14 millions d’euros, soit un prix de journée de 25,6 € par place comprenant une allocation journalière de subsistance (à titre de comparaison, le prix de journée en centre d’accueil pour demandeur d’asile est de 19,5 €, n’incluant pas d’allocation). Que sait-on de ce dispositif, lancé à titre expérimental il y a cinq ans ?
En avril 2015, un premier « centre de préparation au retour » géré par la société d’économie mixte Adoma accueille quarante personnes en Moselle. Le dispositif est alors dédié aux déboutés du droit d’asile faisant l’objet d’une mesure d’éloignement. L’hébergement est conditionné à l’engagement d’un prochain départ volontaire et permet aux bénéficiaires de percevoir une allocation journalière (en plus des aides au retour versées à l’arrivée dans le pays d’origine).
Deux travailleurs sociaux accompagnent les hébergés, tandis que l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) – administration notamment en charge du retour volontaire - intervient chaque semaine dans le centre. Les étrangers sont soumis à une mesure d’assignation à résidence pendant leur séjour, qui ne peut excéder 45 jours, et les gendarmes se rendent régulièrement sur place pour vérifier leur présence. Une part importante d’entre eux ne restera finalement pas dans le centre jusqu’au départ : un premier bilan réalisé après cinq mois de fonctionnement faisait état de 13 retours volontaires effectifs, 17 départs du centre avant le retour, 1 cas de régularisation, et 9 retours forcés. En fin d’année 2015, la préfecture faisait état de 73% de retours (volontaires ou forcés) et 27 % de fuite, tandis que l’OFII indiquait avoir accompagné 32 départs sur 67 entrées dans le centre (soit un ratio de 48%). Un bilan jugé assez positif par les autorités pour développer le dispositif par la suite.
Un second centre de ce type a ouvert en novembre 2016 à Lyon, puis les CPAR se sont plus largement étendu en 2017 en région Ile-de-France, PACA et en Alsace. En 2018, 15 centres étaient opérationnels et 1 648 personnes étaient rentrées volontairement dans leur pays d’origine depuis ces lieux. En 2019, l’OFII indiquait avoir réalisé le retour de 1 370 personnes depuis 14 CPAR. Un rapport parlementaire de juin 2019 listait 16 centres répartis dans 15 départements dont il détaillait la capacité, et faisait état d’un taux d’éloignement « supérieur à 80% » pour les personnes accueillies en 2018, jugeant ce bilan « satisfaisant ».
En 2020, 130 nouvelles places ont été créées, portant la capacité du dispositif (devenu DPAR en remplacement de CPAR) à 1 100 places. Financées dans le cadre du « plan de relance » pour une période de deux ans, les 1 500 nouvelles places prévues en 2021 sont présentées dans l’annexe dédiée à ces crédits comme « temporaires » et visant à « accroitre la fluidité du parc d’hébergement en renforçant la lutte contre l’immigration irrégulière au moyen de dispositifs incitatifs au retour volontaire ». Interrogé par des députés, le gouvernement a indiqué que « ces crédits sont en lien avec la crise sanitaire puisqu’ils visent à favoriser un hébergement rendu plus compliqué par la pandémie ». En tout état de cause, 2 600 places devraient être disponibles fin 2021.
Ce dispositif présente un intérêt évident pour permettre d’héberger un public ayant un accès limité aux dispositifs d’hébergement d’urgence de droit commun. En proposant une option de sortie depuis les lieux d’hébergement pour demandeur d’asile, il participe par ailleurs à la fluidité du dispositif national d’accueil dont 6,8% des places recensées par l’OFII fin 2019 étaient occupées par des déboutés. Les données permettant d’apprécier sa pertinence demeurent cependant limitées, tout comme la visibilité sur les missions de ces lieux qui ne disposent pas de cahier des charges et ne figurent dans aucun texte législatif ou réglementaire.
Un communiqué publié en octobre 2019 par la préfecture d’Ille-et-Vilaine, dans le cadre de l’ouverture d’un DPAR dans le département, apporte quelques éclairages sur le fonctionnement actuel de ces centres. Les personnes déboutées de leur demande d’asile semblent largement visées, mais le dispositif est plus largement « destiné à des personnes en situation irrégulière ayant fait le choix d’adhérer à un programme de retour volontaire vers leur pays d’origine ». L’hébergement est assorti d’un accompagnement « assuré, d’une part, par [l’OFII], qui identifie les candidats et gère le suivi administratif de préparation au retour, et, d’autre part, par un opérateur, qui assure l’accompagnement social ». Une « allocation de subsistance d’un montant de 4€ par personne et par jour » est versée aux résidents pendant la durée de leur hébergement.
Sur les 10 premiers mois de l’année 2020, 642 personnes avaient bénéficié d’un retour volontaire (depuis ces lieux ou en dehors), soit un tiers de moins que l’année précédente sur la même période. Une baisse qui s’explique en partie par la crise sanitaire, qui complique fortement les déplacements internationaux.