Soudan : après deux ans de guerre, les Nations unies évoquent « la plus grande crise humanitaire au monde »
Deux ans après le début de la guerre civile au Soudan, le conflit perdure. La population est confrontée à la famine, à une violence généralisée et à des déplacements dévastateurs qui confrontent le pays à une crise humanitaire sans précédent.
Après trente ans de règne d’Omar el-Béchir, renversé en 2019, le général Abdel Fattah al-Burhane s’est emparé du pouvoir en 2021 lors d'un putsch. Le 15 avril 2023, un conflit a éclaté entre l'armée soudanaise et l’ancien adjoint d’al-Burhane, le général Mohamed Hamdane Daglo, qui commande les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR). Plus de deux ans après le début des combats, le conflit s’enlise. L'armée, qui semble vouloir obtenir une victoire totale, refuse les pourparlers, tandis que les FSR cherchent à étendre la guerre à de nouvelles zones, dont le nord du Soudan, jusque-là épargné.
Les deux camps bénéficient toujours d'un important soutien extérieur (armes, fournitures) pour poursuivre les combats. Cette guerre menace la stabilité des pays voisins, le Tchad et le Soudan du Sud. Au début de la guerre, l’armée a été chassée de la capitale, Khartoum, par les FSR et s’était repliée à l’Est pour transférer le siège du gouvernement à Port-Soudan. Fin mars 2025, l'armée soudanaise a repris Khartoum, y compris le palais présidentiel, et pense ainsi avoir sauvé l'État de la ruine.
La guerre touche pourtant 17 des 18 États du pays. Les conséquences pour les civils sont désastreuses : bombardements aveugles dans des zones habitées, exécutions sommaires, violences sexuelles utilisées comme arme de guerre, torture, disparitions forcées et pillages généralisés. Tous ces actes relèvent de crimes de guerre et certains peuvent également constituer des crimes contre l’humanité, selon la FIDH (Fédération internationale pour les droits humains). L’ONG Acled indique que plus de 2 800 cas de violences ont été commis contre des civils depuis 2023, notamment des attaques de groupes armés, des enlèvements, et des violences sexuelles. Amnesty International dénonce, dans un rapport publié le 10 avril 2025, le recours généralisé aux violences sexuelles (viols, esclavage sexuel, torture, etc.) par les FSR, dans le but d’humilier, d’asseoir leur contrôle et de déplacer des populations dans l’ensemble du pays. Les préjudices physiques et psychologiques pour les victimes et leurs familles sont dévastateurs., En outre, le Soudan figurait parmi les endroits les plus meurtriers pour les journalistes, derrière Gaza, en 2024. Plus de 400 journalistes ont fui le pays depuis le début de la guerre.
Le conflit a provoqué l’effondrement des services de base, la paralysie des circuits d’approvisionnement humanitaire et une hausse exponentielle des besoins, d’après l’ONU. La moitié de la population, soit 30 millions de personnes, est confrontée à la famine. Il s’agit d’après l’ONU de « la plus grande crise humanitaire au monde », qui pourrait encore s'aggraver. Elle touche de manière disproportionnée les femmes et les enfants, dont l’immense majorité est déscolarisée.
Depuis le 15 avril 2023, près de 13 millions de Soudanais ont été contraints de fuir les combats, soit plus d’un quart de la population totale. Parmi eux, 8,9 millions sont déplacés à l’intérieur du pays, dont 53 % sont des enfants, tandis qu’environ 3,8 millions sont réfugiés dans les pays voisins (Égypte, Soudan du Sud et Tchad), souvent dans des conditions de vie très difficiles. Le Tchad a connu ces dernières semaines un nouvel afflux de personnes déplacées de force.
©UNHCR