En 2019, 46 200 personnes protégées au titre de l’asile
Le ministère de l'Intérieur et l'OFPRA ont publié le 21 janvier 2020 quelques données provisoires sur l'asile pour l'année 2019. Elles révèlent une nouvelle hausse de la demande d'asile, qui place la France en tête des pays européens, et un niveau toujours élevé de protection par les instances de l'asile.
Alors que le niveau de la demande d’asile est souvent analysé à travers les statistiques de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le ministère de l’Intérieur diffuse depuis 2017 des données sur l’enregistrement des demandes par les préfectures, qui permettent d’apprécier plus précisément combien de personnes ont sollicité la protection de la France (tous n’étant pas ensuite dans les statistiques OFPRA, notamment les demandeurs sous procédure Dublin). Ce sont normalement ces éléments qui doivent être transmis à l’agence européenne Eurostat, pour comparer le niveau de la demande avec les autres États, mais la France ne se conforme pas à cela et transmets les chiffres OFPRA ce qui fausse la comparaison.
Sur l’ensemble de l’année 2019, un total de 154 620 personnes ont ainsi demandé l’asile en préfecture soit 11% de plus qu’en 2018 (139 320 demandes). Parmi ces demandes, il y a 110 370 premières demandes hors mineurs accompagnants (+0,6%), 9 330 demandes de réexamens hors mineurs accompagnants (+10%) et 34 920 demandes de mineurs accompagnants (+65%). Il convient de noter que les demandes d’asile en rétention, ainsi que les demandes formulées par les réinstallés ne sont pas comptabilisées dans ces statistiques car elles sont directement enregistrées par l’OFPRA : le niveau global de la demande d’asile en 2019 incluant l’ensemble des demandes se situe donc probablement aux alentours de 160 000. En tout état de cause, la France devient le pays européen ayant enregistré le plus grand nombre de demandes d’asile en 2019 devant l’Allemagne (131 870 premières demandes et réexamens, mineurs accompagnants inclus, d’après les données Eurostat).
Au cours de l’année, 46 460 premières demandes (mineurs inclus) ont été placées sous procédure Dublin lors du passage en préfecture, un niveau relativement stable (+1,4%) par rapport à 2018 (45 810). La part des procédures Dublin sur l’ensemble des demandes est en baisse, passant de 33% en 2018 à 30%. 9 560 de ces demandes placées en procédures Dublin en 2019 ont été « éteintes » en cours d’année, pour diverses raisons (échec des demandes de réadmission, annulation des décisions de transfert, clause de souveraineté etc.). À cela s’ajoutent 16 790 demandes d’asile Dublin enregistrées avant 2019, qui ont été éteintes au cours de l’année 2019 et se retrouvent donc dans les statistiques 2019 de l’OFPRA qui enregistre les demandes en procédure normale ou accélérées (108 160) ainsi que ces procédures Dublin éteintes au cours de l’année (26 350).
Au total, 132 614 demandes ont été enregistrées à l’OFPRA en 2019 soit 7,3% de plus qu’en 2018. C’est donc un nouveau niveau record de la demande d’asile en France. Les premières demandes hors mineurs accompagnants connaissent une hausse plus significative encore, +10,2%, passant de 92 338 à 101 762.
L’Afghanistan demeure le principal pays d’origine des demandeurs d’asile à l’OFPRA malgré une légère baisse des premières demandes hors mineurs accompagnants (9 163 en 2019, contre 9 455 en 2018). La Guinée se maintient à la deuxième place, avec là aussi un niveau relativement stable (6 027 contre 6 188 l’année précédente). L’Albanie (5 599, contre 5 793 l’année précédente) cède la 3ème place à la Géorgie (5 780 contre 4 806 en 2018) qui connait une forte hausse, à qui elle prend la 4ème place. Le Bangladesh, qui était en 7ème position en 2018, complète le top 5 et connait une forte hausse (5 457 en 2019 contre 3 654 en 2018).
Le délai moyen de traitement communiqué par l’OFPRA a augmenté en 2019, passant de 150 jours (2018) à 161 jours (5 mois et 11 jours). Le délai médian, dans lequel sont traitées la moitié des demandes, est de 110 jours (stable par rapport à 2018 : 112 jours).
Le nombre de décisions prises par l’OFPRA hors mineurs accompagnants (95 577) est en légère hausse (+2,1%) par rapport à 2018 (92 598). Parmi ces décisions, 22 532 ont accordé une protection soit un taux d’accord de 23,6% (en baisse par rapport à 2018 : 26,3%).
A la Cour nationale du droit d’asile, dont le rapport d’activité a été publié le 29 janvier 2020, le nombre de décisions hors mineurs accompagnants (66 466) est en forte hausse (+40,5%) suite à une année 2018 marquée par d’importantes grèves (47 314 décisions). Le taux d’accord à la CNDA est de 21% soit une hausse par rapport à 2018 (18,4%). La part des décisions prises par ordonnance à la CNDA (juge unique statuant sans audience) demeure élevée (33,5% contre 34,9% en 2018). Les décisions par ordonnance ont pour effet de restreindre la possibilité effective par la Cour de prendre en compte les éléments ultérieurs au recours. Les requérants sont ainsi tenus de réunir dès l’envoi du recours, tous les éléments à l’appui de la demande pour éviter un rejet par ordonnance et bénéficier d’une audience. Une exigence parfois difficile à remplir pour les personnes sans hébergement ni accompagnement.
Au total, le nombre de décisions accordant une protection atteint un nouveau record : 36 512 (contre 33 330 l’année précédente). Cela représente 46 200 personnes protégées. Le taux d’accord global (OFPRA + CNDA), hors mineurs accompagnants, est de 38,2%, là aussi en hausse (35,6%).
Les protections subsidiaires représentent 36% des protections, en baisse par rapport à 2018 (40%) au bénéfice donc du statut de réfugié.
Photo d'illustration © UNHCR/Jón Björgvinsson