L’élaboration d’une Stratégie nationale pour l’accueil et l’intégration des personnes réfugiées en 2018 a permis de donner une impulsion nouvelle aux politiques d’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale (BPI : réfugiés et bénéficiaires de la protection subsidiaire). Ce cadre général se décline chaque année en plusieurs textes réglementaires visant à définir des orientations et objectifs annuels.

Une instruction du 17 février 2021 signée par la ministre déléguée auprès du ministre de l’Intérieur fixe les « priorités 2021 de la politique d’intégration des étrangers primo-arrivants et des bénéficiaires de la protection internationale ». Un enjeu de gouvernance est tout d’abord rappelé aux préfets : la réforme de l’organisation territoriale de l’État mise en œuvre cette année ne doit pas affecter la continuité des missions relatives à l’intégration dont la réussite repose sur un partenariat étroit entre l’État, les collectivités territoriales, les partenaires sociaux et le monde associatif. L’organisation de comités de pilotage réguliers, aux niveaux régional et départemental, doit se poursuivre en 2021. Neuf millions d’euros sont par ailleurs prévus en 2021 pour financier des contrats territoriaux d’accueil et d’intégration (CTAIR) et des projets territoriaux d’accueil et d’intégration (PTAI). Plusieurs mesures présentées en annexe visent par ailleurs à organiser une complémentarité entre les dispositifs d’intégration des BPI et ceux liés au contrat d’intégration républicaine (CIR), qui font l’objet de lignes budgétaires distinctes dans les finances de l’État.

Le deuxième point de cette instruction porte sur le « suivi renforcé » des BPI, et rappelle que l’objectif est de « pouvoir proposer à tous les bénéficiaires d’une protection internationale, un accompagnement personnalisé dans leur parcours d’intégration ». Il est question de simplifier l’accès aux droits tout au long du parcours, de développer les programmes d’engagement avec la société d’accueil et les programmes d’accompagnement global du type HOPE (avec hébergement, sur le modèle du dispositif créé par l’Afpa en 2017) et ACCELAIR (sans hébergement, sur le modèle du programme créé par Forum réfugiés-Cosi en 2002). Ces derniers doivent couvrir l’ensemble des besoins à l’horizon 2022, ce qui suppose une généralisation de ces dispositifs sur l’ensemble du pays, sur la base de diagnostics territoriaux établis préalablement.

L’enjeu de l’accès au logement est également cité, et fait l’objet d’une circulaire spécifique, datée du 18 février 2021, qui fixe les objectifs de mobilisation de logements pour l’année 2021. L’accélération de l’accès au logement permet une meilleure intégration des BPI, cet aspect étant souvent indissociable de l’accès à l’emploi, mais elle permet par ailleurs de favoriser la fluidité du dispositif national d’accueil (DNA) qui ne répond qu’à la moitié des besoins d’hébergement des demandeurs d’asile : le ministère de l’Intérieur indique que 11 665 BPI étaient présents dans le DNA au 30 novembre 2020, faute de solutions de logement pour sortir de ces lieux. Pour 2021, les préfets doivent mobiliser 14 000 logements dont 1 000 pour une mobilité nationale (relogement depuis une autre région) et 13 000 pour un relogement local. Cet objectif est décliné par région, et la circulaire liste plusieurs leviers d’action pour permettre de l’atteindre. Depuis 2018, plus de 58 000 réfugiés ont été relogés grâce à la mobilisation de plus de 28 000 logements d'après les données obtenues auprès de la Délégation interministérielle à l'hébergement et à l'accès au logement (DIHAL). Ces résultats sont chaque année en deçà des objectifs fixés mais on note une amélioration des indicateurs : 43% de l’objectif atteint en 2018 (8 700 logements mobilisés sur un objectif de 20 000), 62% en 2019 (9 500 sur 16 000), 98% en 2020 (9 818 sur 10 000, objectif modeste fixé par une circulaire du 24 août 2020 prenant en compte le contexte de crise sanitaire).

Un troisième point de l’instruction du 17 février évoque l’intégration par l’emploi, indiquant aux préfets qu’au moins 60% des crédits qui leurs sont délégués doivent porter sur des actions autour de cet enjeu. L’annexe portant sur l’intégration par l’emploi met en particulier l’accent sur les freins rencontrés par les femmes primo-arrivantes et propose plusieurs leviers d’action : mieux communiquer sur la mixité des métiers, mieux faire connaître les dispositifs pour la garde des enfants, améliorer la détection des vulnérabilités et des problématiques de santé physique et psychologique. Il est par ailleurs précisé que la certification des compétences professionnelles « doit être favorisée », sans toutefois que de nouvelles mesures ne soient proposées en ce sens.

Ce tableau sur les orientations politiques en matière d’intégration est complété par une instruction relative aux réfugiés réinstallés en date du 24 février 2021. Alors que la France s’était engagée dans le cadre du Forum mondial sur les réfugiés de 2019 à accueillir 10 000 réinstallés sur deux années (2020 et 2021), la crise sanitaire a nettement impacté les programme de réinstallation en 2020. Seuls 1 200 réfugiés résidant dans des pays de premier asile ont ainsi pu bénéficier de ce dispositif impulsé par le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), loin de l’objectif annuel de 5 000 réinstallations. À cela s’ajoutent 116 réfugiés réinstallés en 2020 au titre d’un accord-cadre signé avec le HCR en 2008, dans lequel la France s’engage à examiner une centaine de dossiers de réinstallation par an.

L’instruction fixe donc pour l’année 2021 des « objectifs adaptés au contexte actuel » : il n’est pas question de rattraper le retard pris l’année précédente pour atteindre les 10 000 réinstallations sur deux ans (ce qui aurait amené à un objectif 2021 de 8 800 réinstallations) ni même de maintenir l’objectif initial de 5 000 réinstallations par an. Le ministère de l’Intérieur indique qu’il est prévu de réinstaller 3 800 personnes en 2021, pour compléter l’objectif initial de 2020 et donc de fait diviser par deux l’objectif initial formulé en 2019. Il est toutefois précisé qu’un objectif complémentaire sera défini dans un second temps « en cas d’évolution favorable de la situation sanitaire et sécuritaire ».

Deux nouveaux pays de premier asile, depuis lesquels sont menées les opérations de réinstallation, figurent dans l’instruction, le Cameroun et l’Éthiopie, complétant une liste où figurent 7 autres pays (Liban, Turquie, Jordanie, Égypte, Niger, Tchad, Rwanda). Le texte décrit les modalités opérationnelles des opérations de réinstallation, qui demeurent globalement similaire malgré quelques adaptations liées à la crise sanitaire comme le développement des entretiens par vidéoaudience, et propose une clé de répartition régionale ainsi qu’un calendrier des arrivées.