L’Albanie a adopté de nombreuses mesures visant à lutter contre la traite des êtres humains. Un rapport de l’ONG Asylos publié en avril 2024 rappelle pourtant que ce phénomène demeure présent dans le pays et qu’il concerne aussi les hommes et les garçons dont la situation demeure méconnue.

Depuis la fin des années 1990, le gouvernement albanais a progressivement développé des politiques de lutte contre la traite des êtres humains en ratifiant plusieurs traités internationaux. En outre, le pays dispose de plusieurs lois pour prévenir et protéger les victimes, notamment une loi de 2017 sur les droits de l’enfant et la protection de l’enfance.

Un Conseil consultatif de victimes de traite, a été créé par le Bureau de la coordination nationale de la lutte contre la traite, constitué de victimes de la traite. Une direction des enquêtes sur la cybercriminalité, y compris la pédopornographie, et l’exploitation sexuelle des enfants, a aussi été mise en place.  Conformément à la loi, une personne risque, pour la traite des êtres humains, 8 à 15 ans d’emprisonnement si la victime est majeure, et 10 à 20 ans si elle est mineure.

Pourtant, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rappelle en 2022 dans une note de recherche sur la criminalité organisée que « l’Albanie  est  un  pays  source,  de  transit  et  de  destination  (en  particulier  pour  des  personnes  originaires d’Asie) pour le trafic d’hommes, de femmes et d’enfants à des fins de prostitution et de travail ». L’Ofpra précise que la lutte contre la traite des êtres humains est freinée par la défaillance de la justice et la prévalence de la corruption, en raison desquelles les peines sont rarement appliquées, même si un nombre croissant de trafiquants sont condamnés. Selon le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, il existe un écart entre la reconnaissance des droits, notamment de l’enfant, et l’application effective de ces droits en Albanie. En outre, la part du budget national allouée aux domaines de la protection sociale et de la santé des enfants est faible.

Peu d’informations existent sur le phénomène de la traite des hommes en Albanie. Cependant, plusieurs sources affirment que ce problème pourrait être largement sous-estimé. L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) avait déjà documenté en 2014 l’exploitation d’hommes albanais à l’étranger, et a confirmé l’existence de réseaux d’exploitation d’hommes albanais à des fins de travail, notamment dans les secteurs de l’agriculture, des mines et de la construction en particulier en Grèce.

En avril 2024, l’organisation caritative Asylos a publié un rapport sur la traite des êtres humains en Albanie et notamment sur les hommes.  Selon ce rapport, la traite des hommes et des garçons est « très répandue », mais moins prise en compte. Ces personnes de sexe masculin représentent environ 30 % des victimes de traite. Les communautés égyptiennes et roms sont particulièrement touchées par la traite des êtres humains. Les hommes sont majoritairement soumis au travail forcé, notamment à l’étranger, à la criminalité forcée en Albanie, notamment dans des fermes de cannabis, ou encore à la mendicité forcée. 

Les facteurs de risque sont nombreux, notamment : la pauvreté, les milieux familiaux dysfonctionnels, la violence domestique et les abus sexuels, la corruption, le manque d’éducation, les problèmes de santé mentale etc. Les trafiquants d’êtres humains sont souvent associés au crime organisé, le gain financier étant considéré comme un facteur de motivation. Les fausses promesses et la tromperie liées aux opportunités d'emploi, aux relations ou aux promesses de mariage (mariages arrangés) sont utilisées comme tactique de recrutement.

Les hommes victimes de traite rencontrent des difficultés à révéler leurs expériences de traite ou à s'identifier comme ayant été victimes de la traite, en raison de la honte et de la peur de la stigmatisation et des préjugés, notamment lorsqu’il s’agit d’exploitation sexuelle, et en raison de l'environnement patriarcal de la société albanaise, l’honneur social. Ils sont victimes de stigmatisation dans différentes sphères (professionnelle, communautaire…).

Il n’existe qu’un seul refuge spécialisé dans l’accueil des victimes de traite géré par l'État, et 3 sont gérés par des ONG. Les hommes n’y sont pas accueillis, mais on peut trouver quelques garçons dans des refuges pour mineurs. La prise en charge en matière de soins de santé mentale pour les victimes de la traite est limitée pour tous.