D’après le récent rapport d’Amnesty International sur la peine de mort dans le monde en 2021, le nombre d’exécutions en Iran a augmenté : le pays en a ordonné au moins 314, contre au moins 246 en 2020. Un total qui n’avait jamais été aussi élevé depuis 2017. Selon le rapport 2021 du Département d'État américain sur les droits de l'homme en Iran, le gouvernement n'a pas divulgué le nombre exact de personnes exécutées en 2021. Le nombre réel de personnes risquant d'être exécutées et de celles qui avaient été exécutées en secret est donc probablement beaucoup plus élevé, car les responsables et les médias nationaux n’ont pas toujours publié des chiffres.

Un cadre juridique englobant de nombreuses situations

La loi iranienne prévoit la condamnation à la peine de mort pour meurtre, mais aussi pour de nombreux autres cas : atteinte à la sûreté de l'État, outrage contre des hauts fonctionnaires, « faire la guerre contre Dieu », « corruption sur terre » (apostasie ou hérésie…), rébellion armée, viol, consommation d'alcool récidiviste, relations sexuelles consensuelles entre personnes du même sexe, «insultes contre la mémoire de Imam Khomeiny et contre le chef suprême de la République islamique », etc.

La peine capitale s'applique également en cas de possession, de vente ou de transport de certains types et quantité de drogues telles que l'opium, ou l'héroïne ou la cocaïne. Selon Amnesty International, le nombre d’exécutions recensées concernant des personnes condamnées pour des infractions liées aux stupéfiants a plus que quintuplé, passant de 23 en 2020 à 132 en 2021.

L'adultère reste passible de la peine de mort par lapidation, bien que les autorités provinciales auraient reçu l'ordre de ne pas fournir d'informations publiques concernant les condamnations à la lapidation depuis 2001, selon le rapport du Département d'État américain. Le nombre de femmes exécutées a augmenté, passant de 9 en 2020 à 14 en 2021.

La loi islamique autorise l'exécution des délinquants juvéniles à partir de 9 ans pour les filles et de 13 ans pour les garçons, l'âge légal de la maturité. Durant l’année 2021, les autorités iraniennes ont exécuté trois personnes, âgées de moins de 18 ans au moment des faits qui leur étaient reprochés. Selon Amnesty International, leurs aveux ont été obtenus sous la torture.  Et, cette même année, plus de 80 personnes étaient toujours sous le coup d’une condamnation à mort pour des infractions commises alors qu’elles étaient mineures.

La peine de mort, instrument de répression

Dans plusieurs pays, comme en Iran, la peine de mort est utilisée par l’État en tant qu’instrument de répression contre des minorités et les protestataires. Amnesty international note dans son rapport qu’au moins 19 % des exécutions recensées ont concerné des membres de la minorité ethnique baloutche, alors que cette minorité ne représente qu’environ 5 % de la population totale de l’Iran. D’après le Département d’État américain, des dissidents politiques et des journalistes, condamnés à la peine capitale, avaient été accusés de « faire la guerre à Dieu » ou de « lutter contre les préceptes de l'islam et contre l'État qui respecte ces préceptes » ainsi que « perturber l'establishment islamique » et « coopérer avec des agents ou entités étrangers ».

Des infractions pénales comme « prendre les armes pour ôter des vies ou des biens et semer la peur dans le public », « la corruption sur terre » et la « rébellion armée », sont suffisamment vagues pour permettre aux autorités de condamner à la peine capitale des individus pour simple participation à des manifestations ou d'autres formes de dissidence, même en l'absence de preuves des accusations. 15 personnes ont été exécutées en 2020 pour ces infractions.

Dans un rapport commun intitulé « Personne n’est épargné – le recours généralisé à la peine de mort en Iran », les organisations FIDH (Fédération internationale pour les droits humains) et LDDHI (Ligue de défense des droits humains en Iran) montrent que l’écrasante majorité des crimes passibles de la peine de mort en Iran ne rentre pas dans la définition de « crimes les plus sérieux » établie par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP).

Des procès injustes

Selon le rapport d’Amnesty International, durant l’année 2021, des condamnations à mort par ailleurs ont été prononcées à l’issue de procès injustes,

Le rapport de la FIDH et de la LDDHI évoque de nombreuses sentences de mort prononcées à l’issue de procédures loin de respecter les standards internationaux en matière de procès équitable. Les détenus dans le couloir de la mort sont souvent condamnés sur la base d’accusations vagues et d’«aveux» généralement obtenus sous la torture ou suite à des mauvais traitements infligés en détention avant le procès. Les prévenus passibles de la peine de mort n’ont souvent pas accès à l’avocat de leur choix. Par ailleurs, les autorités iraniennes ont l’habitude de persécuter et de poursuivre les avocats chargés de défendre les condamnés à mort. Certains d’entre eux, comme la lauréate 2012 du prix Sakharov, Nasrin Sotoudeh, sont emprisonnés pour leur travail. Les militants contre la peine de mort sont également fréquemment réprimés.

Le gouvernement a continué de procéder à des exécutions sous la torture, notamment par pendaison par des grues, au cours desquelles des prisonniers sont soulevés du sol par le cou et meurent lentement par asphyxie.

Cet usage fréquent et arbitraire de la peine de mort participe du contexte répressif qui pousse des iraniens à quitter leur pays. Peu d’entre eux arrivent cependant jusqu’en France pour y demander protection. Selon le rapport d’activité de l’Office français de protection des réfugiés et des apatrides, il y a eu 288 demandes d'asile de personnes de nationalité iranienne en 2021 en France, en baisse par rapport à 2020 (328 demandes d’asile).

 

Photo d'illustration : ©Ninara