Depuis juillet 2021, le président tunisien Kais Saied, s'est accordé des pouvoirs supplémentaires, affirmant qu'ils étaient nécessaires pour faire face à la crise que traverse le pays. Depuis, la liberté d’expression, la liberté d’association et le droit à un procès équitable sont menacés. Les institutions considérées comme fondamentales en matière de droits humains ont par ailleurs été affaiblies ou démantelées.

Le 25 juillet 2021, le président Kaïs Saïed (élu président de la République de Tunisie au second tour des élections de 2019 avec 72,7 % des voix), s’est exprimé publiquement pour annoncer sa décision de limoger le chef du gouvernement, de suspendre le parlement et de lever l’immunité parlementaire, et de prendre le contrôle exécutif du pays, invoquant des pouvoirs d’exception prévus par la Constitution dans un contexte où le pays connait plusieurs crises. En vertu d'un décret présidentiel de septembre 2021, toutes les lois sont promulguées sous forme de décrets-lois émis par le président.

Depuis, il a dissous le parlement et le Conseil supérieur de la magistrature (une institution créée pour protéger les juges de l’influence de l’exécutif). Le président s’est attribué les pouvoirs illimités pour gouverner et légiférer, ainsi que des pouvoirs d’intervention dans la nomination et la révocation des juges et des procureurs - ce qui a entraîné la révocation de 57 juges.

En outre, selon Human Rights Watch, depuis la prise de pouvoir de Kais Saied, les autorités ont pris une série de mesures répressives contre les opposants, journalistes critiques, juges et personnalités politiques et des hommes d’affaire pour avoir contesté sa prise de pouvoir. L’ONG fait état d’affectations à résidences sans procédure légale, de détentions secrètes sous couvert de l’état d’urgence, d’interdictions de voyager et de poursuites pour critique publique du président, des forces de sécurité ou d'autres responsables, parfois devant des tribunaux militaires. La police a parfois fait un usage excessif de la force contre les manifestants.

 

Le 21 juillet 2022, Amnesty International publie un rapport intitulé « Une année de régression des droits humains depuis l’accaparement du pouvoir par le président Kaïs Saïed ». Il dénonce notamment le dernier projet de constitution de la Tunisie qui mettrait en danger les droits humains, bien qu’il évoque aussi plusieurs droits essentiels.  Selon l’ONG, le projet de constitution a été publié « à l’issue d’un processus de rédaction obscur et accéléré, sans véritable consultation des organisations de la société civile ou des partis politiques ». Il accorderait au président des pouvoirs relevant de l’état d’urgence, susceptibles d’être invoqués pour restreindre les droits fondamentaux. La justice tunisienne perdrait de son indépendance, son impartialité, et ses moyens de surveillance sur les autorités.

Le 16 août 2022, la nouvelle constitution a été adoptée après un référendum national, malgré une très forte abstention. Elle redonne un rôle central au chef de l’État.

De plus, un nouveau décret-loi paru en septembre 2022, visant à lutter contre la désinformation et les fake-news, risque de servir de prétexte pour légitimer des atteintes à la liberté de la presse et au droit d’informer et d’être informé, d’après Reporter Sans Frontières. Enfin, un projet de loi visant à réglementer les organisations de la société civile pourrait restreindre la liberté d'association, selon Human Rights Watch.