Le 7 janvier 2020, dans une décision saluée comme «un précédent mondial » par Amnesty International, un organe des Nations unies a statué pour la première fois sur une plainte d’un individu demandant l’asile contre les effets du changement climatique.

Le Comité des droits de l’homme, chargé de surveiller la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, a indiqué qu’un État violera ses obligations au titre des droits humains s’ils renvoie une personne dans un pays où sa vie est menacée à cause des effets du changement climatique.

L’affaire concernait un homme originaire des Kiribati, un État situé dans l'océan Pacifique, qui avait présenté un recours devant le Comité des droits de l'homme en 2016 afin de contester son expulsion vers son pays d’origine par la Nouvelle Zélande, où il avait demandé l’asile en 2013. M. Teitiota affirmait que dans son pays sa vie était menacée en raison des conflits pour l’accès aux terres, du déficit d’eau potable, contaminée par l’eau de mer, et d’autres effets liés à la montée des eaux. Si le Comité a estimé que la situation de M. Teitiota ne représentait pas un danger imminent pour sa vie et que, par conséquent, l’expulsion n’était pas illégale, il a toutefois reconnu que «la dégradation de l'environnement peut porter préjudice au bien-être d'un individu et mener à une violation de son droit à la vie».

En rappelant que les États ne peuvent pas renvoyer une personne dans un pays où elle craint de subir une atteinte irréparable au droit à la vie, l’organe des Nations unies affirme que les autorités nationales doivent tenir compte des risques liés au changement climatique avant de prendre une décision d’éloignement. En revanche, le principe énoncé par le Comité reste limité à la protection contre l’éloignement : aucune obligation d’octroyer le statut de réfugié aux personnes qui risquent leur vie à cause de la dégradation environnementale n’est consacré par la décision rendue, qui n’a par ailleurs aucun caractère contraignant pour les 172 États signataires du Pacte relative aux droits civils et politiques (dont la France).

Selon de récentes études, un nombre de plus en plus important de personnes seront obligées d’ici 2050 à quitter leur foyer en raison des effets du changement climatique. Les régions plus touchées par le phénomène seront l’Afrique Sub-Saharienne, l’Asie du Sud et l’Amérique Latine.

A ce stade, la notion de « réfugié climatique » n’existe toujours pas dans le droit international, qui ne prévoit aucun cadre spécifique pour ces situations. La Convention de Genève relative au statut des réfugiés de 1951, protège seulement les victimes de persécution pour des raisons de race, nationalité, religion, opinion politique et appartenance à un groupe social. Le Conseil de l’Europe a récemment appelé les États membres à élaborer, dans leurs régimes d’asile et en droit international, une protection des personnes qui fuient un changement climatique durable dans leur pays d’origine. 

Si la décision du Comité des droits de l’homme rendue en janvier, « ouvre la porte à des situations dans lesquelles des individus pourront dénoncer une violation de leur droit à la vie sur le fondement du changement climatique », comme estime son vice-président Yuval Shany, seule l’élaboration de normes spécifiques au niveau international ou national permettra de donner un cadre légalement contraignant en matière de protection et un statut juridique aux personnes concernées.  

           

 Photo d'illustration : © United Nations Photo