Le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) note que depuis 2014, le nombre de Vénézuéliens demandant le statut de réfugié dans le monde a augmenté de 8 000%. Dans l’Union européenne, le Venezuela était le troisième principal pays d’origine des demandeurs d’asile en 2019. Cependant, les principaux pays d’accueil sont voisins du Venezuela. Comment ces pays ont accueilli les réfugiés ? Quelles politiques ont été mises en place pour accorder un statut juridique aux nouveaux arrivants et donner accès aux services publics ? 

Selon un rapport de l’institution de recherche américain Migration policy institute (MPI) intitulé «An Uneven Welcome » (un accueil inégal) paru en février 2020 et analysant les réponses apportées par onze pays - Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Costa Rica, Équateur, Guyane, Mexique, Pérou, Trinité-et-Tobago et Uruguay – , « dans l'ensemble, les pays d'accueil ont fait preuve d'ouverture et de créativité pour offrir un statut juridique et un accès à l'éducation de base et aux soins de santé d'urgence ».

Plusieurs pays ont conçu de nouvelles façons d'accorder un statut juridique aux migrants qui arrivaient sans visas. La Colombie, le Pérou, l’Equateur et le Brésil ont mené des programmes spéciaux pour octroyer en masse des permis de séjour temporaires aux nouveaux arrivants. L’Argentine et l’Uruguay ont facilité l’obtention de visas de résidence sur la base des accords commerciaux du « Mercosur ».  Le Costa Rica, le Chili et la Colombie ont mis en place des régulations basées sur l’emploi. Selon les auteurs du rapport, les systèmes d'asile dans la région sont débordés et rarement un moyen efficace pour les migrants d’obtenir un statut juridique permanent. Au Brésil, au Costa Rica, au Mexique et au Pérou, les demandeurs d'asile reçoivent cependant des permis de travail temporaires, qui leur confèrent un statut juridique pendant que les demandes sont en instance.

Le Brésil a accordé un statut à tous les Vénézuéliens arrivés sans visas. La Colombie et le Pérou ont à ce jour régularisé plus d'un million de migrants. Ces régularisations donnent droit à la scolarisation et à l’accès aux systèmes de santé nationaux. Dans les faits, il y a dans certaines régions une surpopulation scolaire, donc des difficultés à scolariser les nouveaux arrivants, et des inégalités dans les prestations de soins. Le rapport souligne également des obstacles à la reconnaissance des diplômes et des niveaux de compétence et la plupart des migrants vivent de l’économie informelle.

Ces politiques d’accueil et de solidarité sont aujourd’hui freinées et des pays ont commencé à prendre des mesures pour limiter l’immigration légale, en imposant des conditions plus strictes à leurs frontières.

Depuis deux décennies, des accords régionaux de mobilité ont favorisé la circulation entre les pays, et il était possible de traverser les frontières sans passeport. Les Vénézuéliens pouvaient donc arriver dans un autre pays, avec uniquement une carte d’identité, en tout légalité. Mais depuis deux ans, plusieurs pays demandent de présenter un passeport. Il faut désormais un visa pour aller au Chili, en Equateur, au Pérou et dans l’Etat de Trinité-Tobago dans les Caraïbes. Ces limitations sont motivées par des craintes de répercussions sur le plan économique et sécuritaire d’une immigration massive et qui semble devoir durer. La Colombie doit en outre gérer le retour de presque 500 000 ressortissants qui vivaient au Venezuela.

Ces restrictions n’ont pas eu comme effet de diminuer le nombre d’arrivées mais au contraire de créer des routes illégales et des réseaux de trafiquants. L’obtention de passeport au Venezuela est en effet longue et couteuse et l’obtention d’un visa est incertaine : les personnes en fuite se tournent dès lors vers des canaux illégaux.

 

Photo d'illustration : © UNHCR / Hélène Caux