Cinq ans après avoir proclamé la république après un coup d'État pacifique le 17 juillet 1973, Mohammad Daoud Khan tombe suite à un coup d’état mené cette fois par le parti démocratique populaire d’Afghanistan soutenu par une armée pro-soviétique, le 27 Avril 1978. L’Union soviétique envoie ses troupes en décembre 1979 pour maintenir l'ordre dans le pays et soutenir le pouvoir pro-russe en place.

                                                                   

Les premiers résistants afghans prennent les armes, ce sont les moudjahidines, les "combattants musulmans de la guerre sainte". Plusieurs mouvements prennent part à cette lutte contre l’occupant soviétique, parmi lesquels se trouvent :

- le Hezb-e Islâmi (Parti islamique) de Gulbuddin Hekmatyar qui incarne une tendance dure de l'islam. C'est un mouvement composé majoritairement de pachtouns et soutenu par l'ISI, les services secrets pakistanais

- le Djamî'at-e Islâmi (Société islamique), parti de Rabbani, à majorité persanophone, de tendance islamiste modérée, très connu en Occident avec pour leaders le commandant Massoud, le Lion du Pandjchir, tadjik qui tient la vallée du Pandjchir et Ismail Khan, qui tient la région d'Hérat.

- le ettehâd-e Islâmi (alliance islamique) dirigé par Abdul Rasul Sayyaf, un fondamentaliste proche des saoudiens et du wahhabisme

La guerre devient donc religieuse et c’est dans ce contexte que le ″jihad″ devient international avec le recrutement d’islamistes volontaires venus du monde entier ; en effet, lors de l'invasion soviétique de l'Afghanistan, un certain Azzam fonda, en 1984, le Maktab al-Kadhamat (MAK - Bureau de recrutement) chargé de former les volontaires étrangers désirant participer au djihad afghan. Azzam sera rejoint par Ben Laden

En 1983, Ronald Reagan officialise le soutien des américains à la résistance afghane par le biais du Pakistan. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les Américains qui ont le plus financé le djihad afghan, mais les Saoudiens. Le Pakistan a joué un rôle décisif.

Le 8 février 1988, Gorbatchev annonce le retrait des troupes soviétiques, qui sera définitif le 15 février 1989. Dans cette guerre, 1,5 million d’Afghans furent tués et 6 millions ont dû partir en exil, principalement au Pakistan et en Iran. Le pays ne compte alors que 15 millions d’habitants. L’armée soviétique quitte l'Afghanistan en février 1989, laissant à Mohammed Najibullah le contrôle du pays. Le régime tombe le 29 avril 1992 après la prise de Kaboul et la démission de Najibullah le 16 avril.

La fin du régime communiste en 1992 marque le début de la guerre civile entre factions moudjahidin divisées selon des critères religieux, ethniques et régionaux.

En 1994 apparaissent sur le territoire les premiers talibans, « étudiants en religion » provenant des régions pachtounes du Sud, soutenus par le Pakistan. En septembre 1996, les talibans et leur chef le mollah Omar s’emparent de Kaboul et mettent en place l’Émirat islamique d'Afghanistan en imposant une version rigoriste de la Charia.

Le 9 septembre 2001, le commandant Massoud, chef tadjik ayant combattu contre les Soviétiques et contre les talibans, est victime d’un attentat-suicide. Le 11 septembre 2001, les Etats-Unis sont attaqués, et Oussama ben Laden est tenu pour responsable. Les États-Unis adressent un ultimatum aux talibans pour leur livrer tous les dirigeants d'Al-Qaida. Les talibans refusent.

Les premières bombes d’une coalition dirigée par les États-Unis, le Royaume-Uni et des alliés de l’OTAN tombent sur l’Afghanistan, avec l’aval des Nations unies. Le gouvernement islamique des talibans s’effondre en novembre. Le 5 décembre 2001, la conférence de Bonn établit un gouvernement de transition, avec à sa tête Hamid Karzaï.

La corruption se développe dans des proportions alarmantes estimées entre 260 et 465 millions de dollars pour la seule année 2007 (sur un PIB de 7,5 milliards de dollars). Cette corruption touche tous les fonctionnaires de l'état jusqu'au président Karzaï lui-même.

Le mouvement taliban est chassé du pouvoir et affaibli mais, loin de s’éteindre, il se restructure et se ré-arme, et profite des défaillances du gouvernement et de la coalition. Les talibans commettent des attentats, des enlèvements. Ils sont également présents dans les territoires au plus près des populations, ils rendent la Justice là où les populations reprochent de ne pas voir de police ou de juges fiables, de représentants de l’État. Surtout, ils mènent une politique de pénétration idéologique au sein des populations. Le gouvernement est pour sa part faible et corrompu. Carole André-Dessornes explique que les opérateurs internationaux (ONG, institutions internationales, agences de sécurité, entreprises…) ont court-circuité le gouvernement, participant à son effacement. La coalition a largement pris appui sur les interlocuteurs locaux du pays et les seigneurs de guerre, réduisant encore plus la place du gouvernement central.

Si les talibans ont été renversés en quelques semaines, les forces occidentales ne sont jamais parvenues à contrôler totalement l’Afghanistan

En 2017, les talibans étaient présents dans près de 70% des districts du pays. Les talibans se sont réorganisés, ils ont intégré dans leurs rangs des combattants ouzbeks et turkmènes du Nord, renforçant le caractère national de leur insurrection contre le pouvoir et la coalition. Ils n’ont jamais quitté les territoires dont ils ont repris progressivement le contrôle. A cela il faut ajouter que depuis fin 2014, le groupe Etat islamique (Daech) s'ajoute aux belligérants et à la montée du jihadisme, y multipliant lui aussi les attentats sanglants, et soulignant l'impuissance occidentale dans ce pays. Il ne faut pas oublier al-Qaïda toujours présente et liée au mouvement taliban, en particulier le réseau Haqqani. Il n’est donc pas étonnant, selon Carole André-Dessornes, que les talibans aient repris si rapidement le pouvoir dès le retrait des troupes américaines en août 2021.

L’arrivée des talibans au pouvoir ne garantit en rien une stabilité et une baisse de la violence. Bien au contraire, ces derniers doivent faire face à une recrudescence des attentats, en témoigne la vague d’attaques depuis celle de l’aéroport de Kaboul fin août dernier. Les talibans les plus réfractaires à la politique menée par le nouveau gouvernement, bien que taliban, rejoignent Daech.

NB : une fiche pays Afghanistan réalisée en 2020 par Forum réfugiés-Cosi est disponible, informations ici https://www.forumrefugies.org/nos-actions/en-france/centre-de-formation-et-de-documentation

 

Photo d'illustration : EU/ECHO Pierre Prakash