L’Allemagne est aujourd’hui l’État membre de l’Union européenne accueillant le plus grand nombre de bénéficiaires de la protection temporaire, mais aussi de demandeurs d’asile. Malgré la mise en place de nombreuses facilités pour les réfugiés d’Ukraine, ceux-ci peinent à entrer sur le marché du travail et à s’intégrer.

 

D’après les données de l’agence statistique européenne Eurostat, fin janvier 2024, l’Allemagne était l’État accueillant le plus grand nombre de bénéficiaires de la protection temporaire (1 270 150 réfugiés d’Ukraine ; soit 29,5% du total de l’Union européenne), devant la Pologne (951 560; 22,1%) et la République tchèque (381 190; 8,9%), et loin devant la France (64 725) – qui ne comptabilise cependant que les adultes titulaires d’une autorisation provisoire de séjour. Par rapport à fin décembre 2023, la plus forte augmentation absolue du nombre de bénéficiaires a été observée en Allemagne (+18 905 ; +1,5%).

A cela s’ajoute un grand nombre de demandeurs d’asile : sur l’année 2023, 329 035 premières demandes d’asile ont été enregistrées dans ce pays, loin devant les autres Etats membres de l’UE (l’Espagne, en deuxième position, en a comptabilité 160 460). Le nombre de demandes a même poussé le chancelier, Olaf Scholz, à rétablir des contrôles aux frontières de l’Est en automne 2023. Ceux-ci perdureront au moins jusqu’au championnat d’Europe de football organisé en Allemagne de mi-juin à mi-juillet 2024.

Il convient donc de se demander comment l’Allemagne gère l’accueil et l’intégration des réfugiés d’Ukraine dans ce contexte.

La réponse à cette question n’est pas tranchée. En effet, d’après une étude fédérale, 44% des bénéficiaires de la protection temporaire espèrent rester de manière permanente en Allemagne, ce qui démontre un bien-être dans le pays. Cependant, de grandes difficultés d’entrée dans le marché du travail (permis par la directive relative à la protection temporaire) ont été recensées. Selon plusieurs études sur l’emploi, seuls 20% des réfugiés d’Ukraine y auraient trouvé un emploi, un nombre bien plus bas que dans d’autres pays comme le Danemark (presque 75%), la Pologne ou la République tchèque (60% dans chacun de ces deux pays).

Plusieurs raisons sont avancées :

  • Des difficultés liées à l’apprentissage de la langue ;
  • Des difficultés liées à la vérification et la reconnaissance des qualifications professionnelles, et des diplômes universitaires ;
  • Le manque de logements abordables et permanents empêchant l’obtention d’un emploi ;
  • Le manque d’option de garde d’enfants ;
  • L’aide financière, qui pourrait permettre de vivre décemment sans emploi

Sur ce dernier point, les bénéficiaires de la protection temporaire ont droit à des prestations sociales dès leur arrivée en Allemagne. Elles consistent principalement en un « revenu du citoyen » (Bürgergeld), comme pour les Allemands pouvant y prétendre, de 563 euros par mois pour une personne seule, ce qui est plus élevé que l’aide pour les demandeurs d’asile et les autres réfugiés.

Les États allemands couvrent également des frais d’assurance-maladie et d’hébergement. Des fonds pour l’ameublement et des fournitures scolaires existent aussi.

Le ministre des Finances, Christian Lindner, affirme que l’Allemagne dépensera entre 5,5 et 6 milliards d’euros en prestations sociales pour les réfugiés d’Ukraine en 2024.

En 2023, plusieurs médias ont indiqué qu’un certain nombre de réfugiés quittaient la Pologne pour l’Allemagne pour y obtenir un soutien financier plus important. Il ne faut toutefois pas oublier que d’autres motifs ont été évoqués : des cours de langues gratuits, des salaires plus élevés et des membres de la famille ou des amis installés en Allemagne.

Alors que le pays connaît un manque de manœuvre dans beaucoup de secteurs, incluant la santé, et même les technologies de l’information, les réfugiés d’Ukraine pourraient être une force de travail importante. C’est dans cette logique que le gouvernement a créé le programme « Job Turbo », permettant l’apprentissage de l’allemand en parallèle du travail, et permettant des rencontres périodiques (tous les six mois au plus tard) avec des fonctionnaires, dans le but de trouver un emploi durable et surmonter les obstacles potentiels.

Dans ce pays comme dans les autres, l’avenir du statut de la protection temporaire devra être rapidement fixé par l’Union européenne afin de favoriser une intégration sur le moyen et long terme.