En Belgique, c’est l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil) qui est en charge de l’accueil des personnes sollicitant une protection internationale. Le 8 novembre 2019, l’Agence faisait part d’un besoin urgent de places d’accueil supplémentaires alors qu’elle comptait 25 100 places (contre 21 000 en début d’année). Sans atteindre le record de 2015, la demande d’asile en Belgique est en hausse de 18% par rapport à 2018 avec 27 742 demandeurs d’asile en 2019. Les principaux pays d’origine sont la Syrie, l’Afghanistan, la Palestine, le Salvador et l’Erythrée. Les sorties des structures d’accueil sont par ailleurs moins nombreuses en raison de l’allongement de la procédure d’asile, et plusieurs centres dépassent leur capacité d’occupation.

Pour combler les manques, l’agence a annoncé l’ouverture de nouveaux centres, l’installation de tentes dans plusieurs centres ainsi que des containers pour augmenter la capacité d’accueil existante. Parmi les premières réponses des autorités belges en novembre 2019, la ministre de l’Asile et de la Migration, Maggie De Block, a proposé plusieurs mesures afin d’accélérer le traitement des procédures d’asile et d’augmenter la capacité d’accueil. Du personnel supplémentaire sera recruté pour le Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) et le Conseil du contentieux des étrangers (CCE) afin d’accélérer la procédure qui dure actuellement environ 15 mois, et ainsi réduire la durée de séjour dans les structures d’accueil. De plus, les acteurs privés pourront maintenant se proposer comme structures d’accueil par le biais de deux marchés publics qui portent respectivement sur une procédure d’urgence pour la mise à disposition de places d’accueil et une procédure ordinaire pour la mise à disposition de places de réserve à utiliser en fonction des besoins.

Dans la continuité de ces mesures, la ministre de l’Asile et de la Migration a annoncé le 4 janvier la privation des conditions matérielles d’accueil pour certains demandeurs d’asile afin de garantir une place d’accueil aux « vrais primo-arrivants pendant les mois d’hiver». Deux profils sont visés : ceux ayant obtenu une protection dans un autre Etat membre de l’UE et qui demandent l’asile et l’accueil « pour des raisons sans rapport avec l’asile », ainsi que les personnes refusant d’être transférées vers l’Etat membre responsable de leur demande d’asile en application du règlement Dublin. Le refus de conditions matérielles d’accueil devra être évalué par Fedasil sur la base individuelle en prenant en compte la vulnérabilité de la personne. Une campagne de communication devrait également être lancée pour cibler ces groupes afin de dissuader les « abus » de la procédure d’asile.

Face à ces annonces, les associations belges expriment leurs inquiétudes et alertent sur la présentation erronée de ces demandeurs d’asile comme des fraudeurs. Elles rappellent que pour les demandeurs d’asile sous procédure Dublin, une fois le délai de transfert expiré et à la condition que la personne ait signalé son adresse légale à l’Office des étrangers, la Belgique devient responsable de l’examen de la demande de protection : ces personnes doivent donc être accueillis dans le réseau de Fedasil. Pour les personnes qui ont obtenu un statut de protection dans un autre Etat européen et qui demandent l’asile en Belgique, elles alertent sur certaines conditions d’accueil des bénéficiaires de protection dans les autres Etats membres, où elles peuvent faire face à de fortes discriminations et subirent des menaces. La CGRA traite alors leur demande en procédure accélérée et peut octroyer un nouveau statut si la personne démontre que les conditions de vie dans cet Etat membre où elle a reçu sa première protection constituent un traitement inhumain et dégradant contraire à la Convention européenne des droits de l’Homme. Les associations belges rappellent en outre qu’il est du rôle et de la responsabilité du CGRA, et non des structures d’accueil, de prendre une décision sur les besoins de protection suite à un examen sur le fond des demandes. La loi Accueil de 2007 précise les cas dans lesquels Fedasil peut limiter ou exceptionnellement retirer le droit à l’aide matérielle, qui n’inclut pas les groupes visés par cette nouvelle mesure.

L’enjeu de la capacité d’accueil n’est pas nouveau en Belgique et posait déjà questions en 2018. Durant cette année, le gouvernement avait décidé de fermer 3 500 places d’accueil collectif et 4 000 places individuelles. En novembre 2018, le Secrétariat pour l’asile et la migration a introduit un quota d’enregistrement de 50 demandes d’asile par jour au « Petit Château » dans le centre de Bruxelles, seul point d’accès à la demande d’asile. Sans accès à la procédure d’asile, les personnes ne pouvaient se voir proposer d’hébergement et devaient donc rester dans la rue. Le Conseil d’Etat a suspendu cette mesure un mois après sa mise en œuvre concluant qu’elle était une barrière à l’exercice du droit fondamental à déposer une demande d’asile.

Pour plus d’informations sur l’asile en Belgique – Rapport annuel 2019 – Chapitre 2 : l’asile en Europe