Les crédits de la mission « immigration, asile, intégration », qui seront débattus par l’Assemblée nationale et le Sénat tout au long de l’automne, devraient atteindre 1,82 milliard d’euros en 2020, contre 1,66 milliards en 2019. Le budget consacré à l’asile dans cette mission est de 1,25 milliards d’euros soit 12% de plus qu’en 2019.

444 millions d’euros sont dédiés à l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA), ce qui représente une hausse de 32% par rapport à ce qui était prévu dans la loi de finances 2019 (336 millions d’euros). Les dépenses réelles consacrées à l’ADA pourraient cependant se situer aux alentours de 500 millions d’euros à la fin de l’année, ce qui signifierait donc que le montant prévu pour 2020 est en baisse. L’ADA est en en effet soumise à une sous budgétisation récurrente par les pouvoirs publics, avec un décalage souvent important entre les crédits votés et ceux réellement dépensés, et une difficulté à élaborer un budget sincère. La loi de finances 2018 prévoyait ainsi 317 millions d’euros pour l’ADA mais la dépense réelle cette année-là a atteint en réalité 424 millions d’euros (une donnée qui n’a été connue qu’en mai 2019).

En 2019, le budget était fondé sur une hypothèse de stabilisation de la demande d’asile, alors jugée peu réaliste par les acteurs du droit d’asile – la demande devrait être en augmentation de plus de 10% cette année. Pour 2020, le budget est une nouvelle fois fondée « sur l’hypothèse d’une stabilisation de la demande d’asile et d’une baisse de 10% des demandeurs placés sous procédure Dublin ». Si la demande est stable, hypothèse très incertaine, pourquoi prévoit un budget (444 millions d’euros) certes en hausse par rapport à la loi de finances initiale de l’année précédente (336 millions d’euros), mais probablement en baisse par rapports aux dépenses réelles de l’ADA à la fin de l’année (autour de 500 millions d’euros) ? Le gouvernement estime que plusieurs mesures, notamment une meilleure effectivité des transferts des demandeurs sous procédure Dublin (taux de transfert de 17% au premier semestre 2019, contre 9% en 2018), et les retraits plus nombreux de l’ADA sur la base des dispositions de la loi asile-immigration de 2018, permettront d’opérer des économies.

Concernant l’hébergement des demandeurs d’asile, le projet de loi de finances prévoit de stopper la dynamique de création de place qui avait permis de multiplier par trois le parc d’hébergement entre 2009 (34 645 places) et 2019 (98 476 places à la fin de l’année). Aucune nouvelle place n’est prévue pour l’année prochaine, la seule évolution notable portant sur la généralisation du financement pluriannuel (trois ans) des hébergements d’urgence pour demandeurs d’asile (HUDA). Le sous-dimensionnement du dispositif national d’accueil demeure pourtant criant : le projet de loi de finances rappelle que 48% seulement des demandeurs d’asile éligibles aux conditions d’accueil étaient hébergés en 2018, et abaisse la prévision pour 2019 de 72% (chiffre figurant dans le projet de loi de finances 2019) à 52% (donnée actualisée). Pour 2020, il est prévu d’héberger 63% des demandeurs d’asile grâce à l’accélération des procédures, la consolidation du parc d’hébergement, et le renforcement de sa fluidité.

L’augmentation de budget la plus marquante porte sur les moyens accordés aux instances de l’asile. Il est en effet prévu que l’OFPRA soit doté en 2020 de 200 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires dont 150 officiers de protection et 50 personnes pour les services supports. La CNDA, dont le budget est inclus dans la mission « Conseil et contrôle de l’État », verra ses effectif augmenter de 59 ETP ce qui entraînera notamment la création d’une 23ème chambre de jugement. L’objectif affiché est d’atteindre un délai moyen d’instruction de 5 mois à l’OFPRA fin 2020 (contre 6 mois en 2019) : le délai de deux mois, visé pour 2019, est un objectif repoussé à fin 2021. A la CNDA, il est prévu d’atteindre un délai moyen de 4 mois fin 2019. Le traitement d’une demande d’asile dans un délai de six mois incluant l’OFPRA et la CNDA, est annoncé pour 2022.

En matière d’intégration des bénéficiaires d’une protection internationale, le budget pour les « actions d’accompagnement des réfugiés » est porté à 33,2 millions d’euros (+ 3,1 millions) afin notamment de mettre en œuvre plusieurs mesures prévues par la Stratégie interministérielle d’accueil et d’intégration des réfugiés rendu publique en juin 2018 (voir notre article de newsletter de septembre 2018). L’augmentation du budget de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) (+4% / 248 millions d’euros au total) vise par ailleurs à poursuivre la mise en application des mesures figurant dans cette Stratégie.

Concernant l’éloignement, il est prévu une hausse de 130 places dans le dispositif de préparation d’aide au retour (DPAR), dédié aux déboutés du droit d’asile, qui comptera donc plus de 1000 places fin 2020. La création de nouvelles places en centres de rétention administrative (CRA)  devrait également se poursuivre en 2020 (+ 480 places annoncées sur la période 2018-2020). Le taux d’éloignement après un placement en CRA est estimé à 50% pour 2019 et l’objectif pour 2020 est fixé à 60%. 

Enfin, un tableau sur l’évolution globale des crédits de la mission « immigration, asile, intégration », non contraignant mais qui permet d’en savoir plus sur les orientations envisagées, fait apparaitre une baisse progressive : ils passeraient de 1,81 milliards d’euros en 2020 à 1,75 en 2021 et 1,59 en 2022.