Suite à l’adoption du Pacte sur l’asile et la migration par le Parlement européen et le Conseil, la Commission européenne a publié le 12 juin 2024 un plan commun de mise en œuvre. Ce document a pour but d’aider les États membres à élaborer leur propre plan de mise en œuvre national, afin d’appliquer les textes au printemps 2026.

Le Pacte sur l’asile et la migration sera applicable mi-2026, à l’exception du règlement relatif à la réinstallation, qui l’est d’ores et déjà. La période de transition pour la mise en œuvre et l’application des différents textes est de deux ans. Cependant, certains éléments devront être en place avant cette date. C’est par exemple le cas du premier cycle annuel de solidarité, qui commencera en juin 2025, et des stratégies nationales de gestion de l’asile et de la migration (prévues par le règlement « gestion »), que les États membres transmettront à la Commission d’ici juin 2025.

La Commission européenne est tenue, en vertu du règlement « gestion » et du règlement « procédure », de présenter un plan commun de mise en œuvre du Pacte. Compte tenu de la complexité dudit Pacte, la Commission a décidé d’avancer l’adoption de ce plan de septembre à juin 2024, afin que les États membres aient le maximum de temps pour préparer leurs plans nationaux de mise en œuvre, qui doivent être présentés avant le 12 décembre 2024.

Ce plan est commun à tous les États membres et à tous les textes, « pour un système bien préparé ». Il est le résultat d’une collaboration avec les États et les agences compétentes de l’Union européenne (UE), notamment par le biais de la conférence ministérielle sur l’opérationnalisation du Pacte organisée par la présidence belge du Conseil de l’UE en avril 2024, ainsi que diverses réunions du Comité stratégique du Conseil pour l’immigration, les frontières et l’asile (SCIFA). La Commission a également tenu des consultations avec la société civile, dont le groupe d’experts de la Commission sur les points de vue des migrants, ainsi qu’avec le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

Ledit plan indique offrir aux États la souplesse dont ils ont besoin pour adapter les obligations découlant du Pacte à leurs systèmes nationaux, mais un certain nombre des nouveautés s’appuient sur les pratiques existantes. Les États membres sont d’ailleurs encouragés à partager leurs meilleures pratiques.

La Commission a divisé le plan en 10 points – qui ne correspondent pas chacun à un texte :

  1. Un système commun d’information sur la migration et l’asile : Eurodac
  2. Un nouveau système de gestion des flux migratoires aux frontières extérieures de l’UE
  3. Repenser l’accueil
  4. Procédures d’asile équitables, efficaces et convergentes
  5. Procédures de retour efficaces et équitables
  6. Un système juste et efficace : faire fonctionner les nouvelles règles de responsabilité
  7. Faire fonctionner la solidarité
  8. Préparation, planification d’urgence et intervention en cas de crise
  9. Nouvelles garanties pour les demandeurs de protection internationale et les personnes vulnérables, et surveillance accrue des droits fondamentaux
  10. Réinstallation, inclusion et intégration

Dans chacun de ces points, la Commission rappelle les règles présentent dans les textes, ses tâches et celles des agences de l’UE, et fournit des détails sur les éléments à prendre en compte dans la mise en œuvre.

Plusieurs éléments positifs ressortent de ce plan : de nombreuses références aux droits fondamentaux ; des appels à la coordination et coopération, notamment avec la société civile ; un rappel au fait que des alternatives à la rétention sont possibles, que les conditions matérielles d’accueil (CMA) comprennent des soins de santé mentale et des conditions d’accueil spécifiques en cas de vulnérabilité ; une mention de l’obligation de confirmation des informations reçues par le demandeur ; et un rappel de l’obligation de garantir la reconnaissance des qualifications aux bénéficiaires de la protection internationale.

Toutefois, il existe aussi des éléments négatifs : le plan rappelle la possibilité de conditionner largement les CMA, précise que le concept de « pays-tiers sûr » pourrait faire l’objet d’une prochaine proposition de modification (avant même l’application du nouveau texte), et indique que Team Europe (groupe qui n’est pas prévu dans les traités formé par un représentant de la Commission européenne accompagné par des représentants de certains États membre uniquement dans le but de conclure des accords) utilisera tous les leviers économiques et de développement disponibles pour favoriser les accords avec des pays tiers.

Comme mentionné précédemment, les règlements « gestion » et « procédure » obligent également les États à créer des plans nationaux en fonction du plan commun. Ces derniers devront comprendre les actions à entreprendre et un calendrier.

La Commission encourage les États à travailler sur la base d’un groupe de travail interministériel et intersectoriel au niveau national, et à utiliser les partenaires sociaux, les autorités locales et régionales et d’autres parties prenantes, en particulier les représentants des organisations de la société civile, par des échanges réguliers.

La Commission invite les États à partager leurs projets de plans d’ici octobre 2024, afin d’assurer un dialogue sur les besoins et les ressources disponibles pour une finalisation d’ici le 12 décembre 2024.

Les États doivent tout d’abord commencer par cartographier la situation actuelle (en termes de législation, mais aussi de structures, de ressources humaines, de formations, contrôles, etc.). La Commission a par ailleurs élaboré un modèle pour les plans nationaux pour aider les États.

Les principaux repères indicatifs pour les États membres sont les suivants :

  • Au plus tard le 1er juillet 2024, ils devraient mettre en place des structures nationales de coordination et nommer le coordinateur national (si ce n’est déjà fait).
  • D’ici octobre 2024, ils devraient soumettre leur projet de plan national de mise en œuvre à la Commission.
  • Au plus tard le 12 décembre 2024, les États communiquent leur plan national à la Commission.
  • D’ici le premier semestre 2025, la Commission adoptera la décision d’attribution de fonds au titre des programmes nationaux dans le cadre de l’examen à mi-parcours du Fonds asile, migration et intégration (FAMI) et de l'instrument de soutien financier à la gestion des frontières et à la politique des visas (BMVI), sur la base de statistiques actualisées reflétant la clé d’allocation en 2021-2023.
  • D’ici le premier semestre 2025, la Commission attribuera aux États une partie du financement provenant de l’examen à mi-parcours du cadre financier pluriannuel par le biais du mécanisme thématique.
  • D’ici le premier semestre 2025, les États devraient lancer des marchés pour l’acquisition d’équipements et des activités de construction.
  • Au premier semestre 2025, les États devraient lancer le processus de recrutement.
  • Mi-2026, les États membres devraient être prêts à appliquer le Pacte.

Il est à noter que le plan indique que les ressources supplémentaires provenant de l’examen à mi-parcours des programmes et de la révision du cadre financier pluriannuel ne couvriront pas tous les besoins attendus. Il sera donc nécessaire de prioriser et de concentrer les financements nationaux et communautaires disponibles sur les besoins les plus urgents, tels que des actions visant à mettre en place des capacités adéquates pour mener à bien la procédure frontalière, fournir des conseils juridiques, et renforcer les systèmes d’asile et d’accueil.

Enfin, la Commission va organiser plusieurs groupes de travail sur les différents sujets du Pacte pour optimiser la mise en oeuvre.