Le Parlement européen adopte sa position dans le cadre de la révision du règlement sur les procédures d’asile
Le 13 juillet 2016, la Commission européenne présentait le deuxième paquet de révision du régime d’asile européen commun incluant la refonte et la transformation de la directive Procédures en un règlement européen commun. Dans le cadre d’une procédure législative ordinaire, la Commission des libertés civiles, justice et affaires intérieures du Parlement européen s’est mis d’accord le 25 avril sur une position commune par le vote d’un rapport et entamera prochainement les négociations interinstitutionnelles avec le Conseil de l’Union européenne et la Commission européenne.
Plusieurs propositions de la Commission européenne ont suscité des inquiétudes (voir notre document de positionnement de septembre 2017). Si la simplification est bien l’un des objectifs affichés par la Commission européenne, ses propositions renforcent les procédures dérogatoires comportant des garanties limitées pour les demandeurs d’asile, en particulier au regard des délais de procédures et des modalités de recours. Le Parlement a quant à lui souhaité « assurer le bon équilibre entre les bonnes garanties procédurales pour les véritables demandeurs d’asile et, en même temps, la prévention des abus qui contribuent à l’effondrement du régime d’asile européen actuel » selon Laura Ferrara, députée rapporteuse du dossier.
Le Parlement se positionne pour un maintien du dépôt de la demande d’asile dans l’Etat membre de première entrée ou dans celui établi par le règlement de Dublin révisé. Le demandeur d’asile doit être dûment informé, dans un langage clair, de la procédure, de ses obligations et de ses droits, et doit pouvoir bénéficier d’une assistance juridique et d’une représentation légale gratuites. Les demandes d’asile devront être enregistrées dans les trois jours, et la protection devra être octroyée dans les six mois, ou neuf en cas de circonstances exceptionnelles. Le Parlement a également introduit des garanties supplémentaires pour les enfants. Les décisions relatives à ce public doivent être prioritaires. Tous les mineurs non accompagnés doivent bénéficier d’un tuteur dans les 24 heures après la demande, et toujours avant que les données biométriques ne soient collectées. De plus, qu’ils soient accompagnés ou non, les enfants doivent recevoir des informations sur mesure sur leurs droits en matière d’asile.
L’application du concept de « pays tiers sûr » pose également de nombreux problèmes dans cette révision tant sur les aspects juridiques qu’en matière de solidarité et de partage des responsabilités. En particulier, l’accès à la procédure d’asile en Europe est actuellement compromis pour nombre de personnes en besoin de protection ayant transité par la Serbie ou la Turquie du fait de l’application désormais systématique des concepts de « pays tiers sûrs » par la Hongrie et la Grèce respectivement, dans le cadre d’un examen de recevabilité. Alors que la Commission européenne souhaitait systématiser l’application de cette procédure de recevabilité, y compris dans le règlement Dublin, avant tout étude de la demande d’asile sur le fond, le Parlement européen s’est positionné pour une procédure facultative. De plus, la nature du « lien avec le pays tiers sûr » doit relever de critères pertinents, propres à favoriser l’intégration des personnes en besoin de protection tels que la présence d’un membre de la famille, la langue parlée, la résidence dans ce pays par le passé etc. Le seul transit par ce pays ne peut suffire à établir « un lien » pertinent comme proposé par la Commission européenne. Le Parlement européen demande ainsi à ce que la demande de protection internationale puisse être considéré comme irrecevable si le demandeur a déjà été reconnu comme réfugié dans un pays tiers – premier pays d’asile – ou s’il a un « lien suffisant », comme une résidence antérieure, avec un pays sûr où l’on pourrait « raisonnablement s’attendre à ce qu’il cherche un protection ». De plus, les concepts de premier pays d’asile et de pays tiers sûr ne doivent pas s’appliquer aux mineurs non accompagnés selon le Parlement., à moins que cela soit clairement dans leur intérêt
Enfin, le règlement prévoit l’établissement d’une liste de pays d’origine sûre commune aux Etats membres de l’UE. Le Parlement a adopté la liste suivante : Albanie, Bosnie-Herzégovine, Macédoine, Kosovo, Monténégro et Serbie. Les députés ont ainsi choisi de ne pas inclure la Turquie dans la liste. Cette dernière pourra être modifiée par les co-législateurs sur base des informations fournies par les Etats membres, le Bureau européen d’appui en matière d’asile, le Service européen pour l’action extérieure, le Conseil de l’Europe, le HCR et des organisations non gouvernementales.