Les voies complémentaires d’admission permettent à des personnes en besoin ou bénéficiaires d’une protection internationale d’accéder de manière sûre et légale à un pays tiers dans lequel leurs besoins de protection sont satisfaits. Elles s’ajoutent à la réinstallation, principale voie légale d’accès pour les réfugiés, qui permet à des personnes vulnérables protégées dans un premier pays d’asile d’être accueillies dans un nouveau pays d’accueil avec un statut de résidence permanente. L’ensemble de ces programmes constituent des voies d’accès légales et sûres ainsi que des solutions durables pour répondre aux besoins de protection croissants et soutenir les pays qui accueillent le plus grand nombre de réfugiés dans le monde. Dans le cadre du Pacte mondial sur les réfugiés et de la Déclaration de New-York pour les réfugiés et les migrants, le Haut-commissariat aux réfugiés a lancé la stratégie triennale sur la réinstallation et les voies complémentaires en juillet 2019 afin de renforcer l’accès à ces voies légales et fournir des lignes directrices dans le développement de nouveaux programmes. L'objectif est que d’ici fin 2028, 3 millions de réfugiés bénéficient d’une protection et de solutions efficaces, via la réinstallation (1 million) dans cinquante pays et les voies complémentaires (2 millions).

Parmi ces voies complémentaires figure le développement de la mobilité étudiante des réfugiés à travers notamment les programmes dits de « couloirs universitaires ». En effet, le HCR souligne dans une récente étude l’accès restreint des réfugiés à l’enseignement supérieur avec un taux d’inscription de seulement 5%, face à un objectif de 15% pour 2030. Les problématiques sont en effet nombreuses. 27% des réfugiés vivent dans les pays les moins développés du monde induisant un accès limité aux universités locales qui nécessitent des moyens supplémentaires en matière d’infrastructures, de matériels, et d’enseignants formés. Les projets d’études à l’étranger sont également semés d’embuches pour les réfugiés qui peuvent faire face à des obstacles supplémentaires par rapport à un étudiant étranger : difficulté d’accès à l’information, niveau d’étude exigé, accès restreint à des bourses financières pour couvrir les frais de scolarité et de vie sur place, prérequis administratifs dans les procédures d’inscription universitaire et d’obtention du visa incluant la demande de pièces justificatives, manque de reconnaissance des diplômes et expériences antérieures, accès limité aux tests de langue, accès et durée de validité d’un document de voyage, statut de l’étudiant réfugié dans le pays d’étude… Si les universités ont développé des programmes d’accueil pour les demandeurs d’asile ou les réfugiés déjà présents sur le territoire, les programmes destinés aux étudiants étrangers prennent rarement en compte la spécificité de l’accueil d’un étudiant réfugié depuis un pays tiers.

Ainsi, afin d’améliorer l’accès aux programmes universitaires pour les réfugiés depuis un pays de premier d’asile, des programmes dits de « couloirs universitaires » se sont développés ces dernières années dans plusieurs pays, notamment au Canada, Japon, au Mexique, au Portugal, en Allemagne, en Lituanie, en Italie mais aussi plus récemment en France. Ils se matérialisent par des accords ad-hoc et des projets de partenariats afin de permettre l’accueil de réfugiés depuis leurs pays d’asile vers un pays tiers afin de commencer ou de poursuivre ces études via un visa étudiant. Ces programmes reposent sur un travail partenarial important et central entre plusieurs acteurs clés tels que l’établissement d’enseignement supérieur d’accueil et les réseaux universitaires, les associations, les autorités nationales (ex : ministère de l’Enseignement supérieur, de l’Intérieur, des Affaires étrangères, ambassades et consulats dans les pays de premier asile), les organisations internationales (ex : HCR, OIM, AUF), le secteur privé (ex : fondation, entreprises), les communautés d’accueil et la société civile, et les étudiants réfugiés. Chaque projet dispose de ces propres spécificités en matière de soutien financier, de niveau d’études, de critères de sélection, mais vise dans  l’ensemble à renforcer l’accès des étudiants réfugiés à l’enseignement supérieur dans un pays tiers depuis un pays de premier asile à travers un soutien financier et administratif centré autour de ces besoins pour lui permettre de commencer ou poursuivre son projet universitaire.

L’expérience de Forum réfugiés-Cosi dans le développement de couloir universitaire d’abord dans le programme avec l’Ecole supérieure de commerce et de développement 3A, puis avec l’Université de Clermont-Ferrand a permis d’identifier des enjeux et des étapes clés de mise en œuvre, de la sollicitation de l’établissement d’enseignement à l’accueil et l’accompagnement du réfugié sur le territoire. Elle souligne le besoin constant d’adapter et de faciliter les procédures pour les étudiants réfugiés, notamment dans les démarches administratives auxquels se heurtent les réfugiés du fait de la spécificité de leur statut et de la méconnaissance des acteurs institutionnels. Le soutien financier représente également un obstacle majeur qui peut être surmonté par l’accès à une bourse universitaire, par la mobilisation d’acteurs du secteur privé tels que des fondations ou des entreprises, mais aussi d’autorités locales comme les municipalités ou les régions. L’accueil et l’accompagnement de l’étudiant réfugié sur place nécessite également une coordination entre une association locale connaissant le public spécifique des réfugiés, l’établissement d’enseignement supérieur, et la communauté d’accueil à travers des systèmes de tutorat, d’hébergement solidaire ou de parrainage citoyen. Enfin, l’enjeu de la protection et de la durabilité de l’accueil doit également être au cœur du programme permettant ainsi à l’étudiant réfugié d’envisager librement plusieurs choix après la fin de ses études : la recherche d’un emploi dans le pays d’études, le dépôt d’une demande d’asile ou le retour dans le pays de premier asile. Le développement des programmes universitaires fait ainsi appel à des projets et des solutions axés sur l’innovation qui mobilisent un large spectre d’acteurs pouvant soutenir et renforcer l’accès à l’enseignement supérieur pour les réfugiés. 

 

Photo d'illustration : © UNHCR/Valerio Muscella