Depuis plusieurs années, la République centrafricaine est affectée par des crises politiques, sécuritaires et humanitaires liées aux violences armées, aux tensions intercommunautaires et à des désastres tels que les inondations et les incendies. Les violences et les exactions exacerbent les conditions de précarité et de vulnérabilité pour une grande partie de la société, notamment les femmes qui subissent des violences sexuelles croissantes.

Dans le contexte de conflit qui affecte la République centrafricaine (RCA), les groupes armés utilisent le viol et l’esclavage sexuel comme une arme de guerre, sachant que la majorité des victimes ne signalent pas ces violences et ne se font pas soigner.

Néanmoins, le phénomène de violence sexuelle en RCA va bien au-delà du contexte de conflit, comme le précise Médecins Sans Frontières (MSF) dans un rapport d’analyse sur les violences sexuelles publié en octobre 2023 (« Des blessures invisibles. Les conclusions de MSF sur les violences sexuelles en RCA entre 2018 et 2022 »). En effet, s’il a été constaté que 20% des agresseurs sont armés, la grande majorité d'entre eux font partie de l'entourage proche de la victime (environ 70%).

Entre 2018 et 2022, plus de 34 000 cas de violence sexuelle, ont été recencé par (MSF) et par l'agence des Nations unies pour la santé sexuelle et reproductive (UNFPA), dont plus de 19 500 pris en charge par MSF.

64% des victimes pris en charge par MSF sont des adultes, et la grande majorité sont des femmes (95 %). Les autres sont des mineurs ou des hommes. Les survivants de ces agressions sexuelles sont confrontés à de nombreux obstacles pour obtenir des soins en temps voulu, notamment la peur, le coût et l’accès aux centres de soins (manque de moyens de transport ou de ressources, éloignement des centres de santé) ou l'inefficacité des parcours de soins. De nombreuses personnes viennent des zones rurales vers la capitale, Bangui, pour y chercher de l'aide, ce qui peut représenter des heures voire des jours de voyage pour se faire soigner ; sans compter la dangerosité des routes.

En Centrafrique, les auteurs restent très peu condamnés en raison d'une impunité flagrante. Peu de victimes décident d'intenter une action en justice. Elles n’ont pas accès à la protection ni à un soutien socio-économique et juridique. Parfois, les familles essaient d’abord de résoudre les problèmes à l'amiable, de trouver un accord financier avant d'aller devant le juge, surtout si la victime est mineure. Ces victimes et leurs familles sont confrontées à de la stigmatisation et à des obstacles considérables pour poursuivre leur vie au sein de la communauté.

Selon Human Rights Watch, les victimes de violences subissent plus de mariages forcés et de grossesses non désirées, ainsi que le rejet par la communauté et leur famille. Globalement, en 2022, 68 % des filles ont été mariées avant leurs 18 ans. Le taux de grossesse chez les adolescentes et femmes de 15 à 19 ans était de 229 pour 1000. La République centrafricaine se situe au deuxième rang mondial en termes de prévalence du mariage des enfants.

Les violences et les exactions engendrent le déplacement forcé de centaines de milliers de personnes à travers le pays (440 840 déplacements internes à la fin août 2023, selon l’OIM) et la fuite vers les pays voisins. Selon Human Rights watch, un Centrafricain sur quatre est déplacé à l’intérieur du pays ou a cherché refuge à l’étranger. En France, l’Ofpra a enregistré 514 demandes d’asile de ressortissants centrafricains en 2022.

Les rapports de Médecins Sans Frontières, de Human Rights Watch et le rapport d’activité 2022 de l’Ofpra cités dans cet article sont disponibles dans la bibliothèque numérique ADOC de Forum réfugiés.