Les données statistiques publiées par plusieurs institutions en janvier 2024 font apparaitre un nombre record de demandes d’asile enregistrées en France en 2023, mais aussi une proportion croissante de demandeurs privés de toute aide matérielle.

Le ministère de l’Intérieur a publié en janvier 2024 les premières données sur l’asile en France pour l’année précédente. On y apprend qu’un nombre record de 149 511 premières demandes d’asile ont été enregistrées sur l’ensemble de l’année 2023, dont 145 522 formulées auprès des préfectures au sein des guichets uniques pour demandeurs d’asile (GUDA) – en hausse de 6,4% par rapport à 2022 -, 3 191 présentées par des personnes arrivées par un programme de réinstallation, et 798 enregistrées en rétention. À cela s’ajoutent 21 910 demandes déjà enregistrées une première fois précédemment en GUDA (réexamens, nouvelles demandes Dublin et réouvertures).

Les Afghans restent les plus nombreux à demander l’asile, avec 16 948 premières demandes enregistrées en GUDA (en baisse de 25% par rapport à 2022), suivis par les Guinéens (10 567 / +71%), les Turcs (9 837 / -1%), les Ivoiriens (9 635 / +64%) et les Bangladais (9 570 / -9%). Au 31 décembre 2023, 25% des primo-demandeurs étaient sous procédure Dublin (36 917 demandes). Une partie des personnes placées sous Dublin en 2023 ont vu leur procédure « éteinte » et requalifiée cette même année (donnée non communiquée cette année) tandis que 16 184 personnes « Dublinées » les années précédentes sont aussi revenus sous la responsabilité de la France et ont pu déposer leur dossier à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

En 2023, l’OFPRA a enregistré 142 496 demandes de protection (+8,6%) dont 123 400 premières demandes et 470 demandes d’apatridie d’après la communication de l’Office également publiée en janvier 2024. Les demandeurs d’asile enregistrés à l’OFPRA (qui n’inclut donc pas ceux sous procédure Dublin) sont aussi majoritairement Afghans (plus de 17 500 premières demandes) pour la sixième année consécutive mais le top 5 est complété par le Bangladesh (8 600), la Turquie (8 500), la République démocratique du Congo (8 000) et la Guinée (7 000).

Sur 136 751 décisions rendues par l’OFPRA (incluant les décisions de réouverture de dossiers clos), 44 479 ont attribué une protection au titre de l’asile (statut de réfugié ou protection subsidiaire) soit un taux de 32,8% (+3,6 pts par rapport à 2022). La Cour nationale du droit d’asile (dont le rapport d’activité 2023 a été publié le 31 janvier 2024), saisie de 64 685 demandes de recours, a rendu 66 358 décisions permettant de protéger 16 329 personnes supplémentaires. Le taux d’accord global, incluant les décisions OFPRA et CNDA, est de 44,5% pour cette année. Au total, ce sont 60 808 personnes (incluant les mineurs) qui ont été protégés par la France au titre de l’asile en 2023, un niveau jamais atteint (+8,1% par rapport à 2022).

Concernant les délais, l’OFPRA a rendu ses décision en 4,2 mois en moyenne (contre 5,2 mois l’année précédente) tandis que la CNDA a statué dans un délai moyen de 6,1 mois (contre 6,5 mois en 2022).

D’après la base de données européenne Eurostat, 146 175 demandes d’asile étaient enregistrées en France au 31 décembre 2023 (en cours d’instruction au fond, ou soumises à une procédure de transfert Dublin) soit 2% de plus qu’à la fin de l’année précédente (142 940). À cette même date, on apprend à travers une publication de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) sur les réseaux sociaux que 102 196 demandeurs d’asile bénéficiaient de l’allocation pour demandeurs d’asile (ADA) et étaient donc éligibles aux conditions matérielles d’accueil (incluant l’ADA et, en fonction des besoins et des disponibilités, une place dans un lieu d’hébergement dédié). Ainsi, près de 44 000 demandeurs d’asile - soit 30% de l’ensemble de ce public – étaient privés de toute aide matérielle fin 2023, une tendance déjà constatée les années précédentes et qui se renforce.

Pour les demandeurs d’asile bénéficiant des conditions matérielles d’accueil (CMA) et ne disposant pas d’un hébergement, les documents annexés au projet de loi de finances 2024 publiés à l’automne 2023 estimaient que 59% seraient hébergés dans un lieu dédié à la fin de l’année (une proportion bien moindre si on la rapporte à l’ensemble des demandeurs d’asile, incluant ceux sans CMA).